Trauma et Hauts Potentiels

par | Sep 16, 2020

La question des traumas, du traumatisme et des chocs post-traumatiques m’est rapidement apparue comme une composante incontournable dans le monde des hauts potentiels. A l’époque cela relevait plus d’une intuition que d’une pensée construite.

Pourquoi ?

Certainement parce que j’ai vécu des années dans des postures dissociées, bloquée dans une réalité déconnectée de mes pairs. Ce fut par ailleurs un moteur extraordinaire dans mon parcours de réappropriation de mes compétences. La voie corporelle fut pour moi la clé.

Aujourd’hui, la composante traumatique est de plus en plus connue. Beaucoup  d’écoles, de techniques, de pratiques s’appuient  sur les travaux du Dr Stephen Porges et sa théorie polyvagale. 

 

Stephen PORGES

Théorie polyvagale

en trois mots : Systèmes neuronaux hiérarchisés

Dès notre venue au monde, nous somme câblés pour nous connecter. Etre en lien, relié à soi et au monde de notre premier au dernier souffle, toute une partie de notre énergie est investie dans cette « grande mission ».

Notre corps s’inscrit dans une évolution phylogénétique. 3 systèmes neuronaux de base sous-tendent chez les êtres humains le fonctionnement du système nerveux et les comportements et émotions qui y sont associés.

Jens Harper : Alpha

Trois systèmes neuronaux¹

  1. Le plus ancien (vagal dorsal non myélinisé) a son origine chez les plus anciens poissons: Les fonctions de ce système primitif sont : L‘immobilisation, la conservation métabolique et le figement. Il agit sur les viscères.
  2. Puis apparaît le système nerveux sympathique, les poissons avec arêtes et les amphibiens, puis, depuis les reptiles, les surrénales y sont associées. Les fonctions de ces systèmes associés sont : La mobilisation et la facilitation de l’action : attaquer ou fuir, ils agissent sur les membres.
  3. Le troisième système, c’est la branche du système nerveux sympathique qui régule le nerf vague (vagal ventral myélinisé). C’est le plus récent, il existe seulement chez les mammifères. Ce système atteint un haut degré de raffinement chez les primates, chez qui il gère les comportements sociaux et relationnels complexes.
    Ce système  nous intéresse tout particulièrement car il gère les muscles fonctionnant de manière inconsciente de la gorge, du visage, de l’oreille moyenne, du coeur et des poumons, qui ensemble communiquent nos émotions aux autres ainsi qu’à nous-même.
    Ce système extrêmement sophistiqué orchestre les relations, l’attachement et le lien.

 

¹ Peter Levine : Guérir par delà les mots , P 105 et ss

 

Hiérarchie dans les réponses du système nerveux

Les systèmes nerveux sont réglés de manière à évaluer les risques potentiels de l’environnement – processus évaluatif inconscient que Porges appelle la « neuroception ».

En général quand on se sent menacé ou contrarié, on va d’abord chercher dans le visage ou la voix de l’autre une quittance et nous tenter de communiquer afin de s’assurer que tout va bien. Ces comportements et réponses à la recherche d’une sécurité collective sont des comportements d’attachement. Ces comportements sont là d’abord pour s’assurer une sécurité, ils sont naturels et tout à fait sains; très présents dans l’enfance, ils devraient, au cours des processus évolutifs, s’internaliser pour que chez l’adulte le sentiment de sécurité soit recrutable à l’interne. Lorsque cela ne se met pas en place correctement vont apparaître des comportements compensatoires se rapprochant d’un trouble de l’attachement perturbant l’engagement social et la communication.

Présent chez tous les mamifères et les primates face à des prédateurs, faire bloc en groupe face à une menace est naturel. Par ailleurs, s’il y a désaccord, l’individu va d’abord tenter de négocier avant d’avoir recours à une réponse d’attaque ou de fuite.

Si ces comportements « sociaux » ne résolvent pas la situation, est mobilisé le système qui permet de se battre ou de fuir, et en dernier recours, si rien ne fonctionne, c’est le système primitif qui s’active : Immobilité, figement et dissociation. Quand se système est actif, il prend les commandes et s’occupe seul de la survie au détriment de tous les autres régulateurs.

Hauts potentiels et trauma !!! on y revient.

Toutes les personnes qui ont des réflexes de protection actifs ont une faible tolérance au stress. Celui-ci peut se répercuter sur tous les sens.

C’est dans un jeu permanent d’interactions entre les processus et les divers plans que s’élabore la manière dont nous allons répondre aux enjeux de la vie. Pour survivre, il n’y a pas besoin de passer par toutes les étapes, par contre pour devenir un être pleinement conscient (développé), plus la base est large, plus les modulations de réponses vont êtres riches. C’est une clé puissante et efficace.

Un adulte ou un enfant qui a peur et refuse de faire certaines choses dans ce cadre, ne le forcez pas !!! il ne va pas «s’habituer».  Son système est réellement en stress majeur, déclenchant une sensation de réel danger. A ce moment-là, il peut y avoir perte de contrôle, agression, comportements irrationnels avec mise en danger de soi ou de l’autre, la personne est en mode survie, c’est lui ou vous !!!!

Le système vestibulaire étant très sensible, les personnes vont être sujettes au mal des transport, avoir facilement la nausée et des vertiges dès que des mouvements de la tête sont impliqués.

Une personne dont les réflexes de protection sont actifs va devoir, d’une manière ou d’une autre, «décharger» son système… Si l’environnement ne permet pas cela, la personne va fuir soit en vous explosant à la figure, soit en s’enfuyant réellement.

C’est lié à l’activation des réponses des systèmes nerveux.

  • Visuel : Hypersensibilité à la lumière, difficulté d’accommodation
  • Auditif : Hypersensibilité aux sons, difficulté à discriminer et filtrer les sons
  • Tactile : Hypersensibilité au touché, matières, les habits «font mal», la douche agresse…
  • Kinesthésique : Hypersensibilité aux changements de position, problème d’équilibre…
  • Gustatif : Hypersensibilité aux goûts et odeurs

Les enjeux liés aux hiérarchies de réponse des système nerveux.

En résumé il y a :

  • Des aptitudes liées aux câblages spécifiques
  • Des processus de développement qui dépendent de paramètres externes et internes à l’individu
  • Des stratégies de protection mises en place lorsque le système ne peut, pour une raison ou l’autre, intégrer le flux d’informations lui parvenant.

Une des composantes de ce câblage est sa vélocité qui va naturellement produire une capacité d’anticipation et de projection importante. Dans ce cadre, les idées projetées par le système peuvent devenir un vrai frein à l’intégration.

Exemple : L’idée que la personne se fait d’un événement va par le biais du système d’activation reticulée (SAR) filtrer et moduler, teinter les informations perçues.

DEFINITIONS
Le trauma :
C’est le moment du choc, le moment où il y a blessure, qu’elle soit physique, émotionnelle ou psychique, ou les trois.

Les traumatismes : Ce sont les conséquences et répercutions liées au trauma, directement liées temporellement à celui-ci

Choc post-traumatique : C’est l’expression du système vagal qui rejoue en boucle, sous l’action de simuli, le trauma et les traumatismes liés

Système d’activation reticulé : Est un faisceau de neurones de la taille de votre petit doigt qui se trouve dans le tronc cérébral (en avant du cervelet, juste en dessous du cerveau, entre celui-ci et la moelle épinière). Cette région est constituée d’un ensemble de cellules nerveuses disposées en réseau dense tout le long du tronc cérébral. Il se trouve au coeur des boucles rétroactives ( feedback) du traumatisme.

Mon hypothèse : L’efficience du câblage HP va générer des représentations activant le SAR qui, au travers de la voie sympathique, va donner des signaux de danger effectifs qui mènent l’individu à se sentir en danger. Afin de répondre à cette sensation, l’individu va s’appuyer sur son système de vigilance, qui va donner de plus en plus de signaux de danger, entraînant celui-ci dans une spirale infernale, souvent quittancée sous l’angle d’une « hypersensibilité ».

En parallèle, le fonctionnement atypique va effectivement générer une réactivité plus grande à l’environnement, ce qui occasionne une potentielle fragilité, d’autant plus s’il y  a dans les processus de développement des étapes qui ne se sont pas bien intégrées.

Face à la dissociation et au figement, le défi est de remettre du lien et du mouvement au coeur de la paralysie, qui est paradoxalement une ligne de défense naturelle.

Dans le figement, il y a immobilité tonique, les muscles se sont raidis pour parer aux coups ou alors, si vous êtes convaincu que vous allez mourrir, les muscles ,au contraire, deviennent flasques comme s’ils avaient perdu toute énergie. Le figement ou dissociation couvre 4 grandes fonctions de survie :

  • Faire l’opposum : Tactique biologique majeure : inertie et passivité, deux attitudes extrêmement efficaces pour échapper au prédateur
  • Disparaitre : Un corps inerte est nettement moins suscpetible d’être vu par un prédateur
  • Survie du groupe :  Si l’un des membres s’effondre, le reste du clan a plus de chance de s’échapper
  • Engourdissment : L’immobilité provoque un état d’engourdissment dans lequel les douleurs, les terreurs sont clairement amoindries car cet état provoque un réel effet analgésique obtenu grace à un flot d’endomorphines. Cela permet à tout individu de se mettre à distance de l’insupportable, rendant celui-ci supportable.

Il n’y a pas de vécu sans histoire, il n’y a que des histoires vécues. Tout ce qui n’a pas pu se décharger et s’intégrer en terme d’apprentissage positif va aller se stocker corporellement sous la forme de « mines anti-personnelles » prêtes à surgir sous l’effet d’un déclencheur. Lorsque l’on aborde un travail corporel, il est intéressant de ne pas oublier que nous avons des systèmes de survie très performants qui souvent viennent freiner nos ardeurs au changement.