Syndrôme de l’Imposteur

par | Déc 8, 2019

L’impression de tromper son entourage, de ne pas être à la hauteur, de ne pas mériter sa situation ou sa place actuelle, etc, est un trait qui ressort très fréquemment dans les échanges avec les personne à HP.

Cela se traduit par la sensation de ne pas être à la hauteur, à la bonne place, la bonne personne…

 » Ca y est : cette fois, ils vont enfin s’apercevoir que …… »  Ce début de phrase révèle un état mental très répandu dans l’Univers des personnes à HP. Pauline Rose Clance (1985) a développé une échelle qui permet de « mesurer » l’étendue de la « chose »….

Il me semble utile de réfléchir à l’importance que revêt cet état mental dans la construction identitaire des personnes à HP :  est-il un moteur, est-il une entrave, contre quoi protège-t-il, pourquoi paraît-il caractéristique, souhaiter en sortir est-il raisonnable ?

Le syndrome est-il un trait de la personnalité ou plutôt un état affectif qui peut être éprouvé par certaines personnes dans certaines situation ?

Les deux :  C’est en tout cas ce qu’affirme Kevin Chassangre dans sa thèse de doctorat : « la modestie pathologique : pour une meilleures compréhension du syndrome de l’imposteur ».

L'IMPOSTURE

 « Ça y est : cette fois, ils [c’est-à-dire mon auditoire] vont enfin s’apercevoir que je ne sais rien et que je ne dis que des bêtises ! »

Trois critères généraux sont communément admis

Plusieurs chercheurs se sont penchés sur ce syndrome. Les descriptions proposent différents axes qui peuvent se définir en trois contenus.

SE SENTIR ILLEGITIME

Une impression d’inauthenticité, d’illégitimité, d’inadaptation malgré des signes évidents et objectifs de réussite

SE DENIGRER

Une tendance à dénigrer ses réalisations et à les attribuer à des facteurs externes.

AVOIR PEUR D’ETRE DEMASQUE

Une peur d’être un jour ou l’autre démasqué(e) par les autres.

Il est important de bien faire la différence entre des personnes éprouvant ce syndrome, considérant un succès comme injustifié, des véritables imposteurs qui n’éprouvent pas ce sentiment.

EXTRAIT D’UNE LISTE DESCRIPTIVE DU SYNDROME DE L’IMPOSTEUR

  1. L’individu se décrit comme un imposteur (tricherie, plalgiat, fausse intelligence, fraude…)
  2. Il a des difficultés à accepter les félicitations et la reconnaissance
  3. Il lui est difficile de croire qu’il mérite les retours positifs
  4. Il tend à être déçu de sa réalisation, pensant qu’il aurait pu mieux /plus faire
  5. Il craint que les autres puissent un jour découvrir son/ses manques de connaissances ou de compétences
  6. Il a peur de l’échec
  7. Il a peur de ne pas pouvoir répéter, reproduire son succès
  8. Il a le sentiment de ne pas être la même personne en public et en privé
  9. ….

Echelle de Clance : Evaluation complète

 

Mécanique infernale dans laquelle les personnes à HP peuvent être prises au piège.

Au moins cinq de ces critères sont nécessaire pour identifier un syndrome de l’imposteur chez un individu.

Tout les critères ne s’exrpiment pas nécessairement ensemble et au même moment.

Et si on se découvre un « léger » syndrome de l’imposteur ?…

Cela renvoie à la question des paramètres externes (milieu, personnes, ressources) et internes (tempérament, gestion des objectifs, traits physiques). Ces paramètres sont propres à chaque individu et  génèrent les filtres par lesquels sont décodés les informations traitées par le système super performant du HP, qui lui est commun aux personnes à HP.

Que faire si l’on est atteint d’un syndrome de l’imposteur ?

Respirer un bon coup et prendre les choses les unes après les autres. Les personnes à HP sont certainement de bons candidats au syndrome de l’imposteur, mais elles ont aussi des ressources à la hauteur de leur potentiel. Il y a deux notions importantes à ce stade qui engendrent les facteurs de vulnérabilité. La notion de résilience chère à B. Cyrulnik, ainsi que de résistance.

La résilience, c’est les processus de réparation de soi ainsi que l’aptitude d’un corps à résister aux pressions et à reprendre sa structure initiale.

Le développement d’un fonctionnement résilient d’un individu repose sur trois données :

  • Sentiment d’avoir une base de sécurité interne
  • Une bonne estime de soi
  • Un sentiment de sa propre efficacité

La résistance est à double tranchant. Il en faut une bonne dose pour aller de l’avant et paradoxalement c’est bien elle qui s’exprime quand il y a des difficultés à accueillir les mouvements internes : les émotions.

L’articulation entre résilience et résistance exprime un facteur de vulnérabilité

Le syndrome de l’imposteur (SI) ne se limite pas à l’intelligence ou aux compétences individuelles. le SI peut aussi concerner les habiletés sociales, le rôle ou les relations au sein de la famille, les activités de loisirs ou sportives, les caractéristiques psychologiques ou encore l’apparence physique.

Au niveau de l’individu

Deux paramètres sont à prendre en compte :

Les environnements : familiaux, culturels, scolaires etc.

Les traits de personnalités tels que l’introversion et / ou les instabilités psychomoteurs, dont découlent les instabilités émotionnelles, qui vont nettement influencer la prévalence d’un SI.

B. Cyrulnik

«Un individu dit résilient n’est pas pour autant un individu invincible ou invulnérable; il n’est pas intouchable ou inaccessible aux émotions, aux sentiments, à la souffrance. S’il fallait comparer un sujet dit résilient à un super héros, il serait plutôt Batman que Superman. En effet, Batman possèdel’intelligence, la force et la technique et certainement des capacités d’adaptation, mais pas de super pouvoirs. De même, le sujet résilient n’est pas un surhomme, il peut rencontrer des limites à sa résilience. Ainsi, rien n’indique que le sujet qui se montre résilient à un moment donné de son parcours de vie le sera tout le temps et face à tout».

La littérature permet de mettre en évidence différents contextes propices au développement d’un syndrome de l’imposteur (SI).  A savoir que tout individu un jour peut se percevoir comme « imposteur » du moment qu’il éprouve de la peine à internaliser ses succès. Rares sont les personnes compétentes qui ne ressentent pas de sentiments d’imposture.

Différents contextes propices au développement d’un Syndrome de l’Imposteur

  • Un environnement de compétition, de concurrence dans son domaine d’activité
  • Un manque de collaboration, de coopération
  • De fortes pressions de réussite
  • Une orientation sur la production, la performance plutôt que les apprentissages
  • Des étapes d’évaluation
  • Une tendance à dénigrer et diminuer ses réussites.
  • Un sentiment d’isolement dans son domaine, un manque de soutien perçu
  • Des succès inattendus
  • Des compliments exagérés
  • Un sentiment d’inauthenticité de plus en plus accru (au niveau social ou personnel)