Un brin de perfectionnisme

par | Juin 6, 2020

Dans le cadre d’un fonctionnement à HP, la notion de perfectionnisme est subtile. Le référent de départ, s’il est faussé, va venir impacter la vision qu’une personne peut avoir de son travail.

Tant qu’une personne à HP n’est pas consciente de sa différence de fonctionnement et l’écart que cela produit dans les différents rapports, elle risque de verser dans le perfectionnisme.  C’est une réponse qui s’observe régulièrement dans la population à HP. Le tout va être de faire la différence entre une attitude perfectionniste et une attitude adéquate.

Tout est une question de standard

Le perfectionnisme ne correspond pas à la recherche de l’excellence, il correspond à la recherche de l’inatteignable, de l’inaccessible.

Cela implique d’avoir « une attitude » qui peut devenir un trait de caractère entrainant une vulnérabilité interne. Il y a des origines à cette attitude et un fonctionnement à HP peut en être une. Quand la personne fusionne et s’identifie à son attitude, elle devient perfectionniste.

  • Elle doit être irréprochable
  • Elle se fixe des standards inatteignable
  • Auto-critique permanente et draconienne
  • Elle se préoccupe du jugement des autres

Cette attitude peut être :

  • Orientée vers soi : C’est le cas des personnes qui ont des attentes et des standards très élevés pour eux-mêmes.
  • Orientée vers les autres : C’est le cas des personnes qui ont des attentes et des standards très élevés pour les autres, auxquels ils mettent la pression.
  • Socialement imposée : C’est le cas des personnes qui pensent que les autres attendent d’eux qu’ils soient parfaits et se sentent obligés de répondre à ces attentes.

De nombreuses recherches tendent à démontrer que plusieurs traits de personnalité sont héréditaires. Il est certain que nous venons au monde avec un tempérament, cela va poser une base et des prédispositions à certaines attitudes plus qu’à d’autre.

Dans le cadre d’un fonctionnement HP

Je dirais qu’il y a plusieurs biais possible. Le premier est malheureusement « induit » directement au dépistage et par la manière dont sont présentés les hauts potentiels, même si cela tend à s’atténuer un peu ces dernières années.

Tu es plus intelligent(e) !!!! synonyme de : Tu vas, tu dois, réussir brillamment….

Le diagnostique d’un fonctionnement à HP dans l’enfance peut de manière insidieuse ouvrir la porte à un degré d’exigence parental qui peut mener en ligne directe vers des attitudes perfectionnistes. En fonction du tempérament de l’enfant celui-ci peut aussi se mettre une pression diabolique et dans ce cas, le perfectionnisme devient l’expression du niveau d’anxiété et de stress dans lequel l’enfant se met tout seul.

La personne adéquate

  • S’impose des standards d’excellence humainement possibles à atteindre
  • Sait doser ses efforts et établir ses priorités sans toutefois négliger l’importance des détails
  • Demeure flexible et sait ajuster ses propres exigences selon le contexte ou l’importance de l’activité
  • Est autocritique, accepte ses propres erreurs et cherche à les corriger
  • Eprouve du plaisir et de la satisfaction dans la réalisation de ses projets et dans l’atteinte de ses objectifs personnels
  • Entrevoit l’avenir de façon réaliste et cherche à prévenir les difficultés. Si celles-ci surgissent, elle cherche et met en place des solutions

 

Le deuxième est lié à l’écart vécu en terme de flow. Soit la zone où l’effort est suffisant pour rendre la notion appétante et en même temps pas trop pour que le sentiment de réussite suive… zone rarement aménagée pour les enfant à HP.

La personne perfectionniste

  • S’impose des standards d’excellence extrêmement difficiles à atteindre, voire impossibles
  • Ne sait pas doser ses efforts, se surinvestissant parfois dans des activités de moindre importance au détriment de certaines plus prioritaires
  • Les détails comptent autant que l’ensemble et elle demeure inflexible dans le choix de ses priorités et de ses façons de faire
  • A de la difficulté à travailler en équipe et à déléguer
  • Doute constamment d’elle-même et n’accepte pas ses limites et ses imperfections
  • Sa valeur en tant que personne dépend de ses succès et de sa réussite
  • Se juge sévèrement et accepte mal la critique. La moindre erreur est vécue comme une cuisante défaite
  • Est une éternelle insatisfaite et ressent très souvent de l’anxiété, de la honte et de la culpabilité
  • Appréhende l’avenir et redoute l’échec

Le troisième est la difficulté à accompagner ces volcans ambulants car, rapidement, leur lucidité combinée à une grande intuition les mettent à distance de solutions simples et adaptées.

Si, dans ces moments-là, le retours de l’environnement n’est pas adéquat, le degré de stress va augmenter rapidement, générant entre autre une attitude perfectionniste.

Il faut aussi admettre que nous vivons dans une société où l’excellence est valorisée au plus au point, quelque soient les dommages que celle-ci génère. Le paraître est davantage félicité que l’authenticité.

Le cercle vicieux du perfectionnisme

En apparence vous êtes parfaits…. cela a un coût…

Vous vous fixez des objectifs inatteignables, et si ils sont atteints c’est que vous êtes médiocre et que cela était facile.

Comprendre quelles sont les origines de votre perfectionnisme est essentiel. Car cela influence grandement la manière dont vous allez pouvoir vous en distancer. Prendre du recul, car si votre « perfection » vous rend service, elle vous dessert autant si ce n’est plus !!!

  • Être obsédé par…. n’aide pas à se mettre au travail. Le perfectionnisme se double habituellement de procrastination. Obsédés par les détails, chaque élément revêt une même importance, les détails envahissent l’espace et le temps passe…
    Tout accable et devient lourd et complexe, cela invite à remettre à plus tard la tâche, juste histoire de s’alléger… Sauf qu’elle sourde en sous fond, telle une source qui ne trouve une voie de sortie.
    Comme l’inconfort est réel , vous allez imaginer que ce n’est pas le bon moment….il faut du temps devant soi, les bons outils, la bonne technique, la bonne formation et surtout… la bonne météo !!!
    L’obsession doublée d’une grande exigence génère une vision du monde déformée… fort de mille projections issues de ce cerveau en roue libre, il est moins dangereux de ne rien faire que de prendre le risque d’être »médiocre »….

  • Un mal-être profond …Notre juge intérieur ne nous épargne pas, les blâmes pleuvent de toute part, comme rien ne satisfait, tout est échec. Comme le perfectionniste procrastine, il se blâme pour le manque de tâches effectuées. Comme il est « parfait », il ne peut demander de l’aide etc.
    Entre frustration et culpabilité, le perfectionniste est mal pris. Pris au piège dans ses propres exigences, assez rapidement un corps de souffrance se met en place et enferme la personne dans une forteresse difficilement prenable. Chaque fois que quelqu’un va aborder le sujet, un pluie d’arguments et de justifications va arroser le « malheureux » qui ose remettre en cause les compétences du perfectionniste… un vrai cercle vicieux mortifère. L’estime et la confiance en Soi finissent toujours par être atteintes au final.

Loin de tous, loin du monde

  • Lâcher Quoi ? … Prise

Pour atteindre la perfection il faut contrôler…Relâcher le contrôle implique qu’il y a risque d’erreur et d’imperfection. donc…

  1. Déléguer = danger, cela pourrait être imparfait et la responsabilité vous en incomberait
  2. Mettre sur pause = Danger, vous pourriez manquer une bonne idée
  3. Corriger inlassablement = indispensable, cela fait toute la différence même si les autres ne remarqueront rien
  4. Ressasser les échecs = refaire le monde et le changer moulte fois
  5.  etc

Tout perfectionniste qui se respecte va inévitablement adopter ce type de comportement. tout devient accablant, même vous-même.

  • Le perfectionnisme ne tolère aucune concurrence et compromet les relations.

Vivre en perfection est d’une exigence à nulle autre égalée. Ce trait de caractère pose un filtre sur toute les actions, pensées, affects. Les perfectionnistes vivent à travers leurs performances. Dès que quelque chose n’est pas à la hauteur de leurs attentes, l’entourage en pâtit. Ce qui arrive très souvent, puisqu’ils placent la barre à des hauteurs impossibles. Le perfectionniste fait passer ses projets avant tout. Comme le travail est un terrain de jeu inépuisable, souvent tout le temps est consacré à le  perfectionner au détriment des relations, même intimes

Dans le cas d’un perfectionniste orienté vers les autres, ses standards de perfections sont imposés à ceux qu’il aime. Le perfectionniste s’attend à ce que leur conjoint(e), enfants, proches parents adhèrent à leur vision et conception de la vie. Cela met de telles pressions sur les relations que ça finit par les rendre impossible.

Le perfectionnisme à ce stade devient une entité en soi qui va se nourrir à tous les êtres de bonne volontés, les vidant de leurs forces.

Le perfectionniste finit en règle générale seul dans sa tour d’ivoire.

  •   Une vision du monde déformée
    Ici se trouve une articulation intéressante entre l’écart de vision d’une personne à HP et un perfectionniste… lorsque les deux font alliances, c’est le jackpot garantit.
    Être perfectionniste signifie avoir le pouvoir de repérer des sons, des images, des mots, comportements et émotions avec plus de finesse qu’une personne normale. C’est aussi une des aptitudes des personne à HP.
    Une personne perfectionniste ne sait pas s’arrêter et se satisfaire ou se contenter de se qui est « suffisant ». Elle va percevoir toutes les imperfections et erreurs, sans pour autant pouvoir les « qualifier » et en évaluer l’importance par rapport à l’ensemble. Il n’y a pas de stop ni de limite.
    Avoir un fonctionnement à HP n’est pas sans limite. Par contre, si un faux-self c’est glissé dans l’équation, la question des limites et d’un possible glissement vers des attitudes perfectionnistes est réelle.
    Une personne à HP perfectionniste risque l’épuisement émotionnel et physique à dépenser un temps infini pour des détails que seule la personne elle-même remarquera.

Et le corps ? et la santé dans tout cela ?
Dans le perfectionnisme, le rapport au monde est déformé. Obsédé par le fait d’être au top, orienté vers les projections permettant de construire cette obsession, le contact avec la réalité physique et les besoins se perd. Cela va inexorablement dégrader la santé et ceci dans bien des domaines.

Ce n’est pas une réelle prédisposition à une mauvaise santé de base. C’est davantage de la négligence car leurs préoccupations premières et leur énergie est mise à atteindre leurs objectifs qui par nature sont inattégniables.

Cette recherche de perfection amène à beaucoup de frustrations, souvent la personne va développer en plus une addiction au travail, elle va naturellement tendre à des compulsions…